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humaines. Ce n’est pas la lutte pour la vie, c’est l’union pour la vie, qui paraît être la loi de l’évolution humaine[1].

5. La coopération, la solidarité humaine ne serait pas la fin de toutes les luttes, de toutes compétitions, de toute concurrence. Celles-ci se maintiendraient à l’intérieur des divers groupes sociaux, à l’intérieur de l’individu même qui sans cela ne serait plus un être de raisonnement et de délibération. Mais au lieu de combattre la coopération, mieux éclairés sur le rôle des deux facteurs nécessaires de toute existence individuelle et collective, nous ferons servir la lutte à rendre la coopération plus étendue et plus complète (E. Fournière). Une libre concurrence des nations se maintiendra dans le domaine de la pensée et du progrès social. Chacun a le droit de souhaiter le triomphe de sa propre patrie dans une lutte si honorable, à condition de rendre justice à l’effort des autres. Les pays ne peuvent travailler séparément à l’amélioration de l’état actuel des choses, mais il faut que les peuples réunissent leurs forces pour obtenir cette réforme. Ils ont plus d’intérêts communs que d’intérêts opposés. Il serait plus avantageux pour tous de travailler de concert que de se détruire.

6. Des occasions nombreuses se sont offertes, mais elles n’ont pas toujours été très bien comprises. Citons des cas. Lors de la découverte de l’Afrique, par exemple, il y avait une admirable occasion de coopérer. On l’a laissée échapper, comprenant mal le programme élevé qu’avait présenté à ce sujet le roi des Belges, Léopold II. L’ambassadeur d’Allemagne à Londres, le prince Lichnowsky, a fait ressortir à diverses reprises auprès des cercles, de la presse, et du commerce la grande tâche que l’Allemagne et l’Angleterre réunies auraient à accomplir en ce monde. Mais les gouvernements sont demeurés dans des formules vagues ou impossibles parce qu’aucun d’eux ne tenait suffisamment compte de la position des deux parties. Voici une coopération réussie. La Grande-Bretagne, le plus grand importateur d’opium en Chine, n’a consenti à limiter ce trafic qu’à la condition que la morphine et autres drogues semblables soient assimilées à l’opium ; de son côté l’Allemagne, où ces drogues se fabriquent surtout, a accepté l’assimilation pourvu qu’elle devint de droit dans tous les pays sans exception. Cela se comprend ; on ne limite pas l’action de son industrie pour la voir prospérer sans réglementation ailleurs. L’unanimité absolue de toutes les puissances a donc été jugée indispensable pour la mise en vigueur du traité international du 23 janvier 1912 concernant l’opium. — Les conventions signées à Algésiras prévoyaient une collaboration des deux pays dans l’exécution, au Maroc, de travaux publics ou l’exploitation d’entreprises industrielles. Après la chute du ministre Briand le cabinet français a opposé la mauvaise volonté aux tenta-

  1. Le dantec, La lutte universelle.