Page:Otlet - Problèmes internationaux et la guerre.djvu/139

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et appliquées au point où nous voulons les faire servir et toutes sont des modalités d’une force unique, l’énergie, qui se transforme en ses divers équivalents. La chaleur ; l’homme se prémunit contre son excès et son manque (nos vêtements, nos maisons, nos ventilateurs). L’électricité : l’homme la capte et l’emmagasine (nos turbines qui tournent à la vitesse de 3000 tours à la minute). La mer : l’homme a lancé sur elle des navires et brave les tempêtes. Les fleuves et les torrents : l’homme les canalise, il leur fait des berges, les détourne, les approfondit. Les isthmes, il les coupe. De même, vingt, cent forces sont diffuses dans la société que depuis la guerre l’on est parvenu à capter, à condenser, à diriger comme une force sociale unique, pendant des mois et des mois. Quelle leçon tous les organisateurs en retiendront pour la paix ! Car à priori ne peut-on pas soutenir que si les mêmes méthodes essentielles que celles employées dans les choses de la guerre, étaient mises en œuvre pour organiser les choses de la paix, la société aurait fait un progrès formidable. L’homme aujourd’hui dirige les forces de la nature et ne se résigne pas à les subir. Semblablement l’homme doit créer des institutions qui soient pour les forces humaines ce que sont les machines pour les forces naturelles.

Les forces humaines sont au nombre de cinq : la force technique qui asservit la nature, les machines, les appareils, qui travaillent pour satisfaire le besoin des hommes, — la force économique qui dispose les relations humaines sur la base des échanges, — la force politique qui tend à la civilisation et au rapprochement matériel des hommes, — la force religieuse qui, appuyée sur le sentiment du divin et de la tradition, cherche à unir l’homme à Dieu, — la force rationnelle d’ordre intime et personnel, qui est l’effort de l’être libre et intelligent pour expliquer le principe des choses et diriger la vie, et qui a son expression dans la science et la philosophie. Tout peuple, toute race, toute civilisation arrivés à un certain degré de développement a une technique, une économique, une politique, une religion hiérarchisée, une science. Ce sont toutes ces grandes forces qu’il importe maintenant de combiner et de faire servir à une meilleure organisation de la Communauté mondiale.

4. Les sociétés sont donc à certains égards des ensembles de forces : l’Énergétique domine la science moderne. Depuis l’unification des différentes formes sous lesquelles l’énergie apparaît dans les phénomènes de l’Univers, on peut dire que l’énergétisme a, en principe, englobé dans son domaine toutes les sciences de la nature. « Il n’est pas une action dans l’Univers que l’on ne conçoive comme devant recevoir un jour prochain son évaluation énergétique. Les phénomènes psycho et physico-énergétiques qui sont à la base de la vie et qui en sont la raison d’être sont aussi à la base des groupements sociaux. Chaque groupe humain particulier, l’espèce humaine tout entière