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production (Loria). Le problème social doit être envisagé dans son ensemble. Les sociétés contemporaines sont livrées d’une part aux conflits entre les masses misérables et les élites possédantes, d’autre part entre les États faibles et les États puissants. Ces conflits qui les entraînent vers des catastrophes pourront être largement évités grâce à cette force si nouvelle : l’association, c’est-à-dire le groupement volontaire et libre. Grâce à elle la pensée de l’intérêt général, de l’intérêt de l’espèce se crée son propre organisme, se divisant et se subdivisant sans se briser, s’adaptant aux mille circonstances, en profitant, les faisant naître favorables et ayant pour base la responsabilité et la solidarité personnelle[1].

L’association ainsi comprise n’est pas seulement en voie de rénover la structure de l’État. Dans le domaine international son action est comparable à celle des coraux et des madrépores qui ont lentement édifié sous l’eau les assises du continent océanien. L’association internationale y a été le support spontané de l’activité dans chaque domaine. Pour organiser aujourd’hui la vie mondiale, nous le verrons, il suffit presque de généraliser et de coordonner ce qu’elle a fait. De toute manière il faut en faire une pierre fondamentale de la société universelle, de la Société des Nations.

233. L’Évolution sociale.


Tout se meut, tout change et tout est en évolution incessante dans la société. Cette évolution se manifeste dans l’histoire par une série de transformations sociales dont les principales étapes sont la tribu, la cité, la nation, l’état, et, aujourd’hui, la Société des États.


233.1. LA THÉORIE DE L’ÉVOLUTION.. — La théorie de l’évolution est la grande pensée du XIXe siècle. En biologie elle admet la transformation progressive des espèces et considère celles qui vivent aujourd’hui comme issues d’espèces différentes dont on retrouve quelquefois les restes à l’état fossile. Les facteurs primaires de l’évolution sont toutes les causes qui déterminent directement la variation des espèces (influence de la lumière, de la chaleur, de la nourriture, etc.) ; les facteurs secondaires sont ceux qui interviennent ensuite pour perfectionner l’adaptation et détruire les êtres les moins bien doués (sélection naturelle, sélection sexuelle, ségrégation). L’évolution sociale est partie de l’évolution générale. Sa conception a ruiné le rationalisme du XVIIIe siècle dans le domaine social[2],

  1. La Combe, De l’histoire considérée comme science, Paris, 1894, p. 405.
  2. Lamarck, Darwin, Hæckel, Weissmann, Semon et autres marquent les grands jalons des progrès de nos connaissances au sujet de la transformation et de la perpétuation des espèces. Lamarck, Philosophie Zoologique (1807). — Darwin, L’origine des espèces par voie de sélection naturelle (1862) ; La descendance de l’homme. — Delage, L’hérédité (1895) ; Les théories de l’évolution. — Le Dant-