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DE LA SAINT-JEAN

tombait et l’orage grondait, je ne pus entendre leurs paroles.

Le troisième soir, le ciel était calme et pur, le vent s’était tu… j’épiai encore le chevalier, et votre dame vint le trouver mystérieusement au rendez-vous.

Je l’entendis nommer l’heure de minuit et la veille de cette sainte fête. — Viens, disait-elle, demain, à l’appartement de la dame de tes pensées ; ne redoute pas le baron mon époux.

Il combat sous la bannière du brave Buccleuch, et je suis seule ; ma porte s’ouvrira pour mon chevalier fidèle la veille de la Saint-Jean.

— Je ne le puis, répond le guerrier, je n’ose me rendre auprès de toi ; il faut que j’erre seul la veille de la Saint-Jean.

— Honte à ta lâcheté, dit-elle, chevalier timide ; tu ne dois pas me dire non, car la nuit de la Saint-Jean vaut le jour le plus beau de l’été quand elle prête son ombre à deux amans.

J’enchaînerai le dogue vigilant. La sentinelle ne t’adressera aucune question ; j’étendrai des nattes de jonc sur l’escalier ; au nom de la croix noire de Melrose et du bienheureux saint Jean, je te conjure, mon amour, de te rendre à mes vœux !

— Vainement les limiers garderaient le silence et la sentinelle ne sonnerait pas du cor. Un prêtre dort dans le pavillon de l’orient ; il entendrait le bruit de mes pas malgré les nattes de jonc.

— Ha ! ne crains point que ce prêtre puisse te découvrir ; il est au monastère de Driburg, où il doit célébrer, pendant trois jours, le sacrifice de la messe pour l’âme d’un chevalier trépassé.

À ces mots le guerrier tourna plusieurs fois la tête en fronçant le sourcil, et ensuite il sourit avec dédain en disant : — Celui qui célèbre la messe pour l’âme de ce chevalier pourrait aussi bien la dire pour la mienne.