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disparaître complètement. Et l’on n’entend plus le murmure du train qui roule. Le coteau est redevenu immobile, silencieux, avec ses carrés dorés que font les champs, ses losanges d’ombre bleue que font les petits bois… Et les villages… qu’est-ce qu’ils ont de plus maintenant ? Rien… rien. Les voilà qui dorment de leur sommeil habituel… Ils ne se sont pas réveillés au bruit qu’a fait le train en passant près d’eux… Alors ?

Alors le maire s’est raffermi dans son idée première. Il se dit maintenant :

— Après tout, un chemin de fer… peuh !… D’ici, parbleu, c’est très joli… Mais on n’en voit pas les tracas d’ici… les ennuis… le trouble quotidien qu’il apporterait dans notre vie municipale… si calme.

Se découvrant tout à coup une âme humanitaire :

— Sans compter les accidents… ajoute-t-il vivement… les télescopages… les garde-barrière en bouillie… Frououou !… Ce serait affreux.

Et il conclut énergiquement :

— Pas de chemin de fer.

Entièrement rasséréné, M. Théophile Lagniaud remonte vers le bourg et siffle, en marchant, des airs joyeux.

Le père Cornélius Fiston, anciennement cantonnier, promu maintenant à la dignité de garde