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gouvernements basés sur la propriété individuelle inviolable, l’armée inviolable, le mariage inviolable, la peine de mort inviolable, les pratiques religieuses inviolables et surtout sur l’inviolabilité des prohibitions douanières. Il veut donc bien servir la République, mais une République qu’il appelle « la République des paysans », une République admirable où les paysans — et sous ce terme il englobe tous ceux qui possèdent peu ou beaucoup de terres, les bourgeois, les nobles et même les paysans — n’auraient à subir aucune charge, à payer aucun impôt.

— Rien que des privilèges, dit-il, car la terre est sacrée.

Ainsi se trouve-t-il passionnément d’accord avec tous les ministères qui, sous les étiquettes les plus différentes, se succèdent au pouvoir.

M. Théophile Lagniaud est corpulent et négligé. Ayant le poil très noir, il semble porter toute sa barbe qu’il ne rase qu’une fois par semaine, le dimanche, pour se rendre à la messe de huit heures. Sur la tête, un chapeau de paille en forme de cloche ; sur le dos, une sorte de blouse en toile bleue, très lâche, une blouse de pêcheur à la ligne, qui laisse voir la chemise bouffant hors de la ceinture de son pantalon, bleu aussi ; aux pieds, des espadrilles blanches, et le sourire de la propagande électorale sur les lèvres. Une fois