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gues pages encore, sir Edward terminait enfin son interminable épître, ainsi :

« Au demeurant gentils, d’humeur allègre, très doux à l’homme, pourvu que l’homme ne les embête pas… comprenez-moi bien, ne-les-embê-te-pas !… »

Pendant que je lisais non sans quelque effarement cette lettre, le petit chien jappait à mes pieds et s’efforçait vainement de téter le bout de mes pantoufles. En dépit de son irritation à ne pouvoir traiter mes chaussures comme des mamelles nourricières, en dépit même de ses méfaits ancestraux, et bien qu’il me fût surabondamment prouvé par tant de Compétences scientifiques que ce chien n’était pas, du moins n’était plus jusqu’à nouvel ordre, un chien… il ne m’effraya pas. D’abord, dans mes jours heureux, dans mes jours de soleil, je suis de ceux qui pensent que l’hérédité n’est pas un principe rigide, que beaucoup d’êtres vivants y échappent, qu’en tout cas, elle peut être combattue victorieusement par l’éducation… Et puis, sans doute, comme voyageur, sir Herpett exagérait un peu et, comme ami, il se plaisait à me mystifier. Et puis, ce petit chien était si petit, si petit… Vraiment, j’avais bien le temps de m’alarmer.

Je l’adoptai donc définitivement, et le bap-