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de vingt-deux… Le soir, les chasseurs allaient les voir, les compter… et ils se disaient : « Ça va bien !… ça va bien ! » Eh bien à c’t’heure, il n’y en a pus… il n’y a pus rien !… Ah ! il est épatant, ce chien-là.

— Piscot… jamais vous ne me ferez croire…

— Écoutez, monsieur…

Et Piscot se rapprocha de moi, l’œil allumé, la voix plus basse, confidentielle.

— Je vais vous le dire à vous… J’sais que vous ne me dénoncerez pas… J’travaillais l’aut’matinée à faire des liens, tout près de la ferme de Joseph Rentoilé… J’avais suivi la manœuvre de Dingo… Et, en dedans de moi, je criais : « Hardi mon gars !… Hardi ! »… Qu’est-ce que ça me fait que Dingo détruise les perdreaux ? Est-ce que je chasse… moi ? Le soir venu, sans avoir l’air de rien, je suis allé par où Dingo avait passé… Eh bien, j’ai ramassé cinq perdreaux… Oui, monsieur, aussi vrai que vous êtes là, cinq perdreaux… et des forts, et qu’avaient de l’aile, pourtant… Comme vous n’étiez pas chez vous ma foi !… je les ai portés chez M. Lagniaud, not’maire… M. Lagniaud m’a dit : « Mais, mon vieux Piscot, c’est défendu de vendre du gibier avant l’ouverture de la chasse. — Bien sûr, monsieur Lagniaud, que je lui ai dit… et de le manger aussi. — Sacré Piscot !… qui m’a dit