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après l’autre… Ma parole… il semblait s’en foutre comme d’une guigne… et il avait un air malin… Ah ! c’est un chien épatant… « Ah ! on va t’avoir, salaud, ah ! t’es pris, cette fois… » qu’y disaient… Et alors ils rétrécissaient le cercle autour du chien, qui les regardait toujours… Et ils criaient tous… et ils avaient ramassé leurs fourches… et ils se serraient de plus en plus autour de Dingo, qui avait le cul contre la meule. Si bien que le gas Roussain se penche… il fait un mouvement pour l’attraper au collier… Mais Dingo, comme une balle qui rebondit, lui saute par-dessus la tête. Il était déjà hors du cercle que l’autre avait pas encore eu le temps de se redresser et qu’il faisait encore le mouvement de l’empoigner au cou… Je rigolais… ah ! je rigolais en voyant Dingo s’en aller, en voyant leurs gueules à eux… Ah ! leurs gueules… Et les v’là qui deviennent comme fous… Ils ramassent des pierres, des mottes, des bouts de bois… Ils les lui jettent après… Nom de Dieu, dit Roussain… fils de garce, dit un autre… Mais Dingo, après un petit galop, s’était arrêté, s’était retourné, et il les regardait avec un air… avec un air !…

Et Piscot se tapa la cuisse :

— J’ai jamais vu… non… j’ai jamais vu une chose pareille… Ils le prendront jamais… jamais… Monsieur…