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sentes couvertes, des broussailles mystérieuses où l’on se cache si bien, où l’on observe si bien, confondu avec la nature, tout ce qui se passe en elle, autour de soi. Et puis le papillon avait disparu. Et puis dans le ciel, très loin, entre et par delà les troncs du bois et ses hautes ramures, elle ne voyait plus passer que des hirondelles qui semblaient des ombres, de toutes petites ombres de feuilles remuées par le vent. Elle aiguisa ses griffes au tronc d’un hêtre mort, qui s’avançait dans la clairière, se gratta le cou, le dessous de la gorge, lissa encore le poil de sa queue, et prudemment, suivant Dingo, elle entra sous la clématite par la coulée. L’herbe y était rare, décolorée, le sol noir et mou, tapissé comme de terreau. Çà et là, quelques brindilles séchées, quelques graines rouges, tombées du sorbier, partout une odeur forte, chaude, enivrante, qui étourdissait un peu. Miche se sentait fatiguée. Elle ne savait plus si elle devait trembler encore ou bien être heureuse. Prenant le meilleur parti, elle se roula voluptueusement sur une touffe d’herbes, étira longuement ses membres avec la grâce onduleuse et cambrée d’une femme qui se réveille, et tout à coup se redressant, l’échine en arc, ronronnant, elle vint se caresser aux jambes de Dingo.

— À la bonne heure !… fit Dingo… Est-ce que