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monsieur fera ce qu’il voudra… Tant pis pour monsieur… Ce chien-là…

Et il me quitta maugréant, et vouant Dingo à tous les diables de l’enfer.

Sur la terrasse, en effet, je trouvai Dingo qui jouait avec Miche fort gaiement. Aucun remords, aucune honte de son crime, chez l’un ; aucune douleur, chez l’autre. Il semblait que rien ne se fût passé d’anormal quelques heures auparavant.

Dès qu’ils m’eurent aperçu, ils vinrent à moi et me prodiguèrent leurs tendresses accoutumées. Dingo me sautait au cou, Miche se frottait à mes jambes, en miaulant de joie…

— Eh bien, c’est du joli !… Ah ! du joli ! dis-je à Dingo. Te voilà assassin, maintenant ?… Tu veux donc que je t’attache à ta niche pour le reste de tes jours ?…

Mais, ils avaient déjà tout oublié. D’ailleurs, ils ne pouvaient prendre au tragique des reproches et des menaces auxquels je mêlais des caresses involontaires. Et, se bousculant, me bousculant, ils me suivirent dans ma chambre, où ils continuèrent leurs jeux, sur le tapis.

La semaine d’après, nous devions passer la journée chez les Legrel qui habitent, neuf mois de l’année, une petite propriété dépendant de la commune de Sazy-sur-Viorne, à six kilomètres au