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FRAGMENTS

sauvages, les barbares civilisés, les Européens. L’Européen est autant au-dessus de l’Allemand que celui-ci est au-dessus du Saxon, et le Saxon au-dessus de l’habitant de Leipzig. Au-dessus d’eux est le citoyen de l’univers. Tout ce qui est national, temporel, local, individuel, peut s’universaliser et ainsi se canoniser et devenir général. Le Christ est un citoyen ainsi ennobli. Ce coloris individuel de l’universel est son élément romantique. Ainsi tout ce qui est national, et même le Dieu personnel, est un univers romantisé. La personnalité est l’élément romantique du moi.

Est-ce qu’en faveur de la supériorité des femmes, ne plaiderait pas cette circonstance que les extrêmes de leur développement sont bien plus frappants que chez nous ? L’individu le plus abject ne diffère pas autant de l’homme le plus honorable, que la femme misérable de la noble dame. Et ceci aussi, qu’on a dit beaucoup de bien des hommes, mais qu’on n’en a pas dit des femmes ? N’ont-elles pas cette ressemblance avec l’infini qu’on ne peut les élever au carré et qu’il n’est possible de les trouver que par approximation ? Et cette ressemblance avec le suprême, qu’elles sont absolument proches et cependant toujours cherchées, qu’elles sont absolument compréhensibles, et cependant jamais comprises, qu’elles sont absolument indispensables et que cependant on s’en passe presque toujours ? Cette ressemblance avec les êtres supérieurs, qu’elles paraissent si puériles, si ordinaires, si désœuvrées