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La vie de M. Chaptal aurait dû s’écouler sans aucun trouble. Doué d’une ame aimante, d’un caractère doux et facile ; modéré dans ses goûts comme dans ses opinions ; plein de bienveillance pour tout le monde, d’affectueux égards pour ses confrères, de dévouement pour ses amis ; heureux d’accorder, lorsqu’il était au pouvoir, et doublant le bienfait en accordant avec grace ; malheureux d’être obligé de refuser, et toujours adoucissant le refus par des paroles qui peignaient la bonté de son cœur ; possesseur d’une belle fortune qu’il avait noblement acquise ; comblé d’honneurs, et ne laissant après lui que des regrets dans les hauts emplois qu’il avait occupés, M. Chaptal semblait devoir être à l’abri des coups du sort.

Cependant quelques revers, des chagrins qu’il était loin de prévoir et de mériter, vinrent obscurcir la fin de sa brillante carrière ; mais il sut les supporter avec dignité, sans murmure, sans exhaler la moindre plainte. C’était une dernière épreuve qui devait nous faire connaître tout entière l’élévation de son ame. Il se consola dans le sein de l’amitié par l’étude et par l’accomplissement de devoirs qui lui étaient imposés ou qu’il s’était créés. Puis, sentant sa fin approcher, trop éclairé pour se méprendre sur la source du mal dont il était atteint, il se résigna comme un sage, fit ses dispositions pour quitter un monde où il n’avait plus que quelques jours à passer, et mourut, chéri, entouré de sa nombreuse famille, en lui donnant sa bénédiction pour dernier adieu.