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EINSTEIN ET L’UNIVERS.

un mot vide de sens. Je suis en un point déterminé de Paris, place du Panthéon, par exemple, et je dis : Je reviendrai ici demain. Si on me demande : Entendez-vous que vous reviendrez au même point de l’espace ? je serai tenté de répondre : Oui. Et cependant j’aurai tort, puisque d’ici à demain la Terre aura marché, entraînant avec elle la place du Panthéon, qui aura parcouru plus de 2 millions de kilomètres. Et si je voulais préciser mon langage, je n’y gagnerais rien, puisque ces 2 millions de kilomètres, notre globe les a parcourus dans son mouvement par rapport au Soleil, que le Soleil se déplace à son tour par rapport à la Voie Lactée, que La Voie lactée elle-même est sans doute en mouvement sans que nous puissions connaître sa vitesse. De sorte que nous ignorons complètement et que nous ignorerons toujours de combien la place du Panthéon se déplace en un jour. En somme, j’ai voulu dire : Demain, je verrai de nouveau le dôme et le fronton du Panthéon, et s’il n’y avait pas de Panthéon, ma phrase n’aurait aucun sens et l’espace s’évanouirait… »

Poincaré complète ainsi sa pensée :

« Supposons que, dans une nuit, toutes les dimensions de l’Univers deviennent mille fois plus grandes : le monde sera resté semblable à lui-même, en donnant au mot de similitude le même sens qu’au troisième livre de géométrie. Seulement, ce qui avait un mètre de long mesurera désormais un kilomètre, ce qui était long d’un millimètre deviendra long d’un mètre. Ce lit où je suis couché, et mon corps lui-même se seront agrandis