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DIAGNOSTIC

Chez les hystériques, — et il ne faut pas croire que ceux-ci se trouvent exclusivement ou seulement même en plus grand nombre dans le sexe féminin, ils se rencontrent chez les hommes aussi fréquemment et peut-être plus fréquemment encore que chez les femmes [1], — chez les hystériques comme chez les dégénérés, ce- qui frappe avant tout, c’est une émotivité extraordinaire. « C’est bien plutôt l’impressionnabilité extrême des centres psychiques », dit M. Henri Colin, « qui constitue le caractère fondamental des hystériques… Les hystériques sont avant tout des sensitifs [2] ». Cette première propriété en engendre une autre, non moins frappante et importante : l’excessive facilité avec laquelle ils peuvent être soumis à la suggestion [3]. Les anciens observateurs ont toujours parlé de l’habitude illimitée du mensonge des hystériques, se sont même indignés contre elle, et en ont fait la marque par excellence de leur condition mentale. En cela ils ont commis une erreur. L’hystérique ne ment pas consciemment. Il croit à la vérité de ses fantaisies les plus folles. La mobilité maladive de son esprit, l’excitabilité exagérée de son imagination amènent à sa conscience toutes sortes d’aperceptions étranges et absurdes ; il se suggère à lui-même que ces aperceptions reposent sur des perceptions réelles, et il croit à la vérité de ses folles fantaisies jusqu’à ce qu’une suggestion nouvelle, soit propre, soit émanant d’un tiers, ait chassé la précédente. Une conséquence de la disposition de l’hystérique à la suggestion, c’est sa manie irrésistible de

  1. Paul Michaut, Contribution à l’étude des manifestations de l'hystérie chez l'homme. Paris, 1890.
  2. Henri Colin, op. cit., p. 14.
  3. Gilles de la Tourette, op. cit.,p. 548 et passim.