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LES SYMBOLISTES

romantiques manquaient de symboles en un certain sens… De là l’erreur de la couleur locale dans l’histoire, le mythe rétréci par une fausse interprétation philosophique, la pensée sans aperception des analogies, le sentiment retiré de l’anecdote ».

Écoutons quelques poètes de second rang du groupe : « L’art », dit M. Paul Adam, « je le définirai l’inscription d’un dogme dans un symbole ; il est un moyen pour faire prévaloir un système et mettre au jour des vérités ». M. Rémy de Gourmont confesse loyalement : « Quant à dévoiler la secrète signification de ce vocable (le mot symbolistes), je ne le saurais. Je ne suis ni théoricien, ni devin ». M. Saint-Pol-Roux-le-Magnifique fait entendre cet avertissement profond : « Qu’on y prenne garde, le symbolisme exaspéré aboutit au nombrilisme et à l’épidémique mécanisme… Ce symbolisme est un peu la parodie du mysticisme… Le symbolisme exclusif est anormal en notre siècle considérable de combative activité. Considérons donc cet art de transition comme une spirituelle niche faite au naturalisme, aussi comme un prodrome de la poésie de demain ».

Des théoriciens et des philosophes du groupe, nous devons attendre des renseignements plus complets sur leurs moyens et buts. M. Charles Morice nous apprend effectivement : « Quant au symbole, c’est le mélange des objets qui ont éveillé notre sentiment, et de notre âme, en une fiction. Le moyen, c’est la suggestion : il s’agit de donner aux gens le souvenir de quelque chose qu’ils n’ont jamais vu ». Et M. Gustave Kahn dit : « Pour moi personnellement, l’art symbolique serait d’inscrire en un cycle d’œuvres