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LE MYSTICISME

elles ne peuvent le forcer à prendre pour de l’argent comptant leurs billevesées. La théologie et la métaphysique ne peuvent jamais être mises dans l'embarras. Il ne leur en coûte rien d’ajouter plus de paroles à leurs paroles, de rattacher à une affirmation arbitraire une autre affirmation, d’entasser un dogme sur un autre dogme. L’esprit sérieux et sain, avide de connaissance réelle, n’aura jamais l'idée de la demander à la métaphysique ou à la théologie. A celles-ci s’adresse seulement le cerveau d’enfant dont le désir de savoir ou plutôt la curiosité est pleinement satisfaite par le ton doucement endormant d’un conte de nourrice.

La science n’entre pas en rivalité avec la théologie et la métaphysique. Quand celles-ci affirment pouvoir expliquer le phénomène cosmique, la science montre que ces prétendues explications sont du pur bavardage. Quant à elle, elle se garde naturellement de substituer à une absurdité démontrée une autre absurdité. Elle dit modestement : « Voici un fait, voici une hypothèse, voici une supposition. Un fourbe seul donne plus qu’il n’a ». Si cela ne suffit pas aux néo-catholiques, ils n’ont qu’à s’asseoir et à chercher eux-mêmes de nouveaux faits qui les aideront à éclaircir les ténèbres angoissantes du phénomène cosmique. Ce serait là une preuve de véritable soif de savoir. A la table de la science il y a place pour tous, et chacun de ceux qui s’associent aux observations communes est le bienvenu. Mais cette idée ne vient pas même en rêve à ces pauvres d’esprit qui radotent de la « banqueroute de la science ». Bavarder est tellement plus facile et commode que chercher et trouver !