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LES SYMBOLISTES

lèrent en de ferventes prières, alors les réactionnaires, qui ont un intérêt de parti à faire croire à un retour de l’humanité civilisée aux ténèbres intellectuelles du passé, s’écrièrent : « Voyez ! La jeunesse, l’espoir et l'avenir du peuple français, se détourne de la science ; l’émancipation a fait banqueroute, les âmes s’ouvrent de nouveau à la religion, et l’Église catholique accomplit de nouveau son office sublime d’institutrice, de consolatrice et de guide de l’humanité civilisée ». On désigne démonstrativement la tendance symbolique par le nom de « néo-catholique », Et quelques critiques voient dans son apparition et ses succès la preuve que la libre pensée est vaincue par la foi. « Le coup d’œil le plus superficiel sur l’état du monde nous montre », écrit M. Edouard Rod, « que, dans tous les domaines, nous sommes en pleine réaction ». Et plus loin : « Je crois à la réaction dans tous les sens que ce mot comporte. Mais jusqu’où ira cette réaction ? C’est le secret de demain [1] ».

Les hérauts jubilants de la nouvelle réaction demandent la cause de ce mouvement, et trouvent avec une unanimité étrange cette réponse : les esprits les meilleurs et les plus cultivés reviennent à la foi, parce qu’ils ont découvert que la science les a trompés, qu’elle n’a pas tenu ce qu’elle leur a promis. « L’homme de ce siècle, dit M. Melchior de Vogüé, a pris en lui-même une confiance bien excusable… Le mécanisme rationnel du monde lui est enfin apparu… Dans l’explication des. choses on élimina… tout l’ordre divin… D’ailleurs, à

  1. Jules Huret, op. cit., p. 14.