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Et de vous, Amazone à cheval, et pliant
Sous le choc d’une flèche impétueuse et fourbe,
Et qui semblez mourir d’amour, en suppliant
Le vague meurtrier qui vous blesse et vous courbe.

— Aigle maigre et divin convoitant un enfant,
Je vous vois, Jupiter, auprès de Ganymède ;
Votre œil de proie, où brille un amour sans remède,
Mêle un rêve soumis à vos airs triomphants.

Je me souviens de vous, jeune guerrier de marbre,
Agile Harmodius auprès de votre ami,
Qui figurez, levant vos deux bras à demi,
L’élan de l’épervier et du vent dans les arbres !

Qu’il fut beau le voyage anxieux que je fis
Sur des rives qu’assaille un été frénétique !
Et je songe ce soir, avec un cœur surpris,
À ces temps où ma vie, errante et nostalgique,
Ressemblait par ses pleurs, ses rêves, ses défis,
Son ardeur à mourir et ses sursauts lyriques,
Aux groupes des héros dans les musées antiques…