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AUX SOLDATS DE 1917


Puissent-ils, ces ardents remueurs de la terre,
Que leur cœur devrait étonner,
Entendre fièrement, quand nous parlons, se taire
Notre grand amour prosterné !

— Ô soldats patients, sérieux, sans emphase,
Qui contemplez votre labeur.
Concevez que la vaine activité des phrases
Nous confonde et nous fasse peur !

Concevez que, vraiment timide, on considère
Vos beaux visages rembrunis.
Où la pluie a frappé, où le soleil adhère.
Où s’est répandu l’infini !

Concevez, qu’ébloui, on se dise : « Ces hommes
Sont l’espace et sont les saisons ;
Et, pourtant, ils étaient jadis comme nous sommes
Leur désir, leurs vœux, leur raison

Inclinaient vers la claire et spacieuse vie.
Vers l’amour, la paix, le bonheur ;
Mais l’offense est venue, ils n’ont plus eu envie
Que d’être têtus et vainqueurs !