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L’AUTOMNE

 
Offrant à l’ouragan une grâce opposée,
Demi-nue, échappant à son feuillage clair,
La cime d’un bel arbre apparaît dans l’éther,
Lucide et reposée.
Un humide brouillard qui songe, gonfle l’air
De latente rosée.

Dans la forêt cinglant pour un fatal départ.
Les biches aux doux pieds, d’un confiant regard
Consultent, le front bas, la terre resserrée,
Et l’on voit onduler, sous la brise moirée,
Leur robe tachetée, ailée et aérée
De faisan et de léopard !

La nature bondit, mais le ciel se résigne.
L’horizon incline au sommeil,
L’étang, compact de froid, semble enclore les cygnes,
Précurseurs de l’hiver, à la neige pareils.

Tout se tait, et pourtant c’est un muet murmure :
Bourdonnement gelé du silence et de l’eau.
Le noir croassement des obliques corbeaux
Fait, dans l’éther uni, une sèche cassure.

Mais, plus que le printemps, plus encor que l’été,
Cette franche saison, pétulante et benoîte,
Avec ses bonds joyeux et ses mollesses d’ouate,
Et ses traînantes voluptés,