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LES TERRES CHAUDES


Pour se poser sur le prunier,
Sur le tronc mauve de l’érable.
Tout l’univers est désirable,
Et se pâme, d’amour baigné…

— Je songe aux villes éclatantes,
À des soleils mornes et forts
Pesant comme une rouge mort
Sur les rivières haletantes.

Ô divin étourdissement
Dans la douce île de Formose,
Lorsque le soir le paon des roses
Fait son amoureux sifflement,

Langueur des villages de paille,
Où, chaude comme l’âpre été,
La danseuse aux doigts écartés
Est un lis jaune qui tressaille.

Moiteur des nuits du Sénégal,
Corps noirs brûlants comme une lave,
Herbe où le serpent met sa bave,
Sanglots du désir animal !

Ô Rarahu, ô Fatou-gaye,
Ô princesse Ariitéa,
Ivres d’un feu puissant et bas
Qui vous brûle jusqu’aux entrailles ;