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LES PINS

Tandis que rit au bord de l’herbe fatiguée
L’eau pleine de bonheur, l’eau si forte et si gaie…

Être pareille à vous, ô buveurs de l’azur,
Arbres dansants et vifs tournés vers le futur,
Qui malgré la plaintive et la tragique écorce
Jetez votre légère et bondissante force,
Votre allègre désir, votre candide espoir
Dans la nue éclatante, et vous penchez pour voir
Sur les coteaux sacrés de la sainte Sicile
Une chèvre enlaçant un amandier fragile…
– Bel arbre pastoral planant sur l’univers,
Colonne torturée où brûle un bouquet vert,
Ah ! que ma vie aussi comme une aile s’éploie !
Que le lait bleu du jour m’étourdisse et me noie,
Que j’élève un front clair dans les vapeurs du ciel
– Qu’importe ton destin, ton martyre ou ta joie,
Il s’agit, ô mon cœur, que tu sois éternel !