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LE ROSSIGNOL DANS LE JARDIN DU ROI


Ah ! comme tu t’émeus, t’énerves et tressailles
Vertigineuse nuit des jardins de Versailles !

Les larmes de mon cœur, montant comme un jet d’eau,
Semblent jaillir soudain du gosier d’un oiseau.
– Rossignol qui chantez dans le léger cytise,
Flambeau mélodieux que le vent doux attise,
Je remets ma douleur à vos divins accents,
Soupirez pour mon cœur, sanglotez pour mon sang…
Vous chantez cette nuit au-dessus du parterre
Où des rosiers, gonflés d’un solennel mystère,
Menés par quelque dieu des jardins et des eaux,
Au son de je ne sais quels cristallins pipeaux
Forment une amoureuse et langoureuse ronde
Et semblent reliés par leur odeur profonde…
Ô lune ! ô banc de pierre ! ô vase de granit !
Romantique douceur, désespoir infini,
Et pourtant le bonheur est là qui se repose