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LA DOMINATION

regardait discrètement et sans curiosité cette peine abondante, cette force de vie qui courait sur ce jeune visage, il eût pu dire à ces larmes : « vous pensez être douloureuses, et pourtant vous entraînez, comme un torrent d’été, de la chaleur et des fleurs, les reflets de la colline et de la lune mince, car c’est votre jeunesse et votre ardeur, ô petite fille ! qui roulent sur vous comme l’eau sur de clairs galets… »

Mais il lui parlait timidement, et elle répondait : « Ah ! monsieur… » en soupirant au travers de ses lourdes larmes ; et bientôt il la vit qui chancelait, épuisée, étourdie, molle et brûlante.

Il eut peur ; doucement, respectueusement, il la prit dans ses bras, — il la portait vers le lit. Si craintive qu’elle fût, elle ne se défendait pas contre cette bonté, et, en vérité, la bonté d’Antoine Arnault, en cet instant, était secourable et pure ; c’était une