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LA DOMINATION

Elle le pria d’ouvrir davantage la fenêtre. Comme Goethe, qu’Antoine Arnault avait tant aimé, la jeune fille qui mourait demandait plus de lumière…

Dans son cerveau pâle et brisé elle comprenait que la vie finissait, elle n’avait pas très peur, parce qu’elle souffrait. Elle s’étonnait de finir.

Le soleil entra ; elle vit le jardin, et comme ses douleurs cessaient, une présence affreuse de l’âme envahit le corps épuisé. De toute sa force elle vécut.

Elle vécut avec une mélancolie surhumaine, une mélancolie plus sourde, plus impitoyable qu’un bourreau, avec la mélancolie des morts, ce que peut être la fin des choses, la fin de vivre à vingt ans.

De sa maigre main elle comprimait son cœur effrayé. Elle comprimait son cœur et regardait la vie et les derniers bruits de la vie. Ses pensées oppressaient son visage et