Page:Noailles - La domination, 1905.pdf/14

Cette page a été validée par deux contributeurs.
7
LA DOMINATION

côté, toute seule dans la vie, selon la loi de tout destin, comme une buée d’automne qui meurt autour de nos pieds…

Ne pouvant se résoudre à passer seul une si émouvante soirée, Antoine alla demander à dîner à son ami Martin Lenôtre.

Il l’aimait. Il lui pardonnait ce qu’il lui reprochait, son humeur douce et les défauts de sa logique.

Martin Lenôtre, âgé de vingt-huit ans, médecin à l’hôpital Lebrun, parfaitement studieux et savant, pensait moins qu’il ne rêvait, et la science que lui-même maniait le surprenait, l’amusait, l’attendrissait comme un miracle. Né dans des campagnes vertes et mouillées, toujours nostalgique de son enfance, il faisait de la médecine avec la douceur d’un botaniste.

Les sureaux, la belladone, l’aconit, blanc et rosé dans les plaines, l’émouvaient, il se sentait troublé comme Rousseau