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LA DOMINATION

quelquefois, comme une eau vive, s’est répandue dans tout mon être, sans raison, venant on ne sait d’où, au cours d’instants infortunés.

Alors, elle pleurait, et se rassurait sous les caresses de son ami.

L’amour que Donna Marie éprouvait lui avait rendu la volupté du soir brûlant sur le canal. Elle s’émerveillait du plaisir, dont elle n’avait point prévu le violent abandon, l’âcre ardeur et la paix. Quoique audacieuse et avide de goûter tout l’amour, elle demeurait timide, de cette timidité qui, plus que ses élans, touchait Antoine.

Cette âme rivée à la sienne, et qui chaque jour, pendant deux heures, perdait pour lui sa prudence, sa pureté et sa force sociales l’émouvait ; il eût seulement voulu qu’elle fût plus souvent douloureuse, semblable aux jours où, sans désir, inquiète d’entrevoir les espaces infinis, Donna Marie pleurait sur les mains d’Antoine Arnault…