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— Qui est-ce qui est heureux ?…

Sa voix était singulière, inusitée. Sabine se leva.

— Pourquoi avez-vous dit cela, s’écria-t-elle, vous avez quelque chose, qu’est-ce qu’il y a ?

Il s’efforça de rire.

— Il n’y a rien du tout. J’étais distrait, bêtement occupé de ce travail.

Il passa la main sur les feuillets épars. Mais l’accent restait blessé.

— Non, non, poursuivit Sabine, il y a quelque chose. Mon Dieu ! mon Dieu ! qu’est-ce qu’il y a ?

Et Philippe voyait monter, chez cette impatiente, les flots pressés de l’épouvante.

— Assieds-toi, fit-il, en lui saisissant le bras et la forçant à s’asseoir ; ce n’est en tout cas pas si grave. Comme tu cries… Il n’y a rien du tout ; seulement ce matin ma femme et mon fils m’ont paru changés, craintifs de moi, méfiants…

Sabine s’était remise debout, le visage dur :

— Qu’est-ce qu’ils ont, dit-elle ? de quoi se mêlent-ils ?

Philippe la regarda avec reproche.

— Ils ne se mêlent de rien, Sabine, ils sont malheureux.