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clignés, comme on regarde, au réveil, l’entrée du jour dans la chambre… Puis un choc violent les portait l’un contre l’autre. Sabine riait fixement. Son corps s’emplissait d’un rêve houleux, défaillant et doux ; elle disait que, quand elle était petite, la balançoire trop rapide où on la mettait, faisait autour d’elle ces coupures de l’air, lui donnait les mêmes accablants transports.

Ils marchaient, s’asseyaient sans pouvoir désunir leurs mains.

La volonté qu’ils avaient l’un de l’autre semblait répandue et entière en chaque partie de leur être. Ils n’eussent pas pu détourner leur tête, ni leurs yeux, ni respirer l’air ailleurs que sur eux-mêmes…

Le poêle, qui rougeoyait aux fentes, soufflait une chaleur compacte comme de la vapeur. Il y avait un grand silence. Sabine, hallucinée, croyait encore, par moments, entendre monter du dehors le bruit pointu des scies sur la pierre. Elle était heureuse et morte. Elle pleurait quelquefois, enivrée, les mains lasses, les cheveux défaits. Elle se sentait étouffer comme si elle avait avalé du bonheur… Quelques objets