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famille, de leurs propres mérites ; et voici que les violons, enduits de rêve, commencèrent de frémir, et que des chants d’hommes et d’enfants éclatèrent dans la tribune, au haut de l’église : c’était une allégresse terrible, un hosanna exténuant d’archanges éperdus, un essoufflement divin.

Ensuite, un ténor chanta seul, et la musique irréligieuse, la perfide musique profane imitait la barcarolle, le glissement des rames et de l’eau, les soupirs de l’amant sous le balcon de l’amante.

Sabine voyait trembler les langues d’or des bougies, les bouquets blancs des fleurs de l’autel.

Sur leurs sièges de velours, Marie et Jérôme étaient tout pâles, troublés de grandeur. Cette étonnante ivresse, ce ciel déchaîné, c’était pour célébrer leur pauvre amour ; cette fête d’or et de feu les rendait précieux l’un à l’autre.

Sabine fut jalouse ; jalouse de penser que pour elle il n’y aurait plus jamais cette pompe, cet apparat ; quand elle aimait un homme, les cieux ne s’en mêlaient plus.