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et elle marchait dans la chambre avec une application, une vigueur inouïes, les bras ouverts dans un geste de force extrême.

Elle se maintenait ainsi, tendue, courbée dans l’attitude d’un arbre sous l’orage, et elle marchait rapidement ayant l’apparence de tordre du fer, de se rompre l’âme.

Et puis succédaient des instants d’abattement, une pluie molle de larmes, une pauvre douceur qui balbutiait. Elle faisait simplement : « Ah !… ah !… » à intervalles réguliers, rythme de libération, discipline adoucissante de la douleur.

Assise, maintenant, elle parlait d’une voix calme, uniforme, devant elle :

— Voilà, voilà, disait-elle, je n’avais que cela, et maintenant je n’ai rien. Je veux que quelqu’un me prenne la main et je lui dirai : « Vous êtes bon, vous êtes bon… » et je mourrai, et je serai tranquille, tranquille… et ce sera si drôle que je sois tranquille, parce que rien en moi, jamais, n’a été tranquille… Et d’abord cela ne me reposera pas d’être morte, parce qu’il faudra que je sois morte très longtemps pour que quelque chose me repose… Et cela sera si fou que je sois morte…