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jette les formes dans l’infini, c’est du mystère que l’intarissable lumière, en le désignant, irradie, révélant : une race.

Si distant de la nôtre, qu’elle te semble, dans le genre humain, une espèce différente de toutes, à part, exceptionnelle.

Dans la nature éternellement en fête qui lui fait un cadre de luxuriance, avec le frisson glorieux de ses grandeurs anciennes, avec les marques fatales de sa présente agonie, avec sa religion recherchée dans ses origines et poursuive jusque dans les conséquences qui l’amènent à l’orée du christianisme : une race, dite par un esprit, le mieux fait, ou l’unique, pour la comprendre et pour l’aimer, par les procèdes artistiques les plus voisins de ce luxe extraordinaire en sa simplicité, luxé animal et végétal où le prodige de l’éclat n’égale que le prodige de l’ombre installée au fond de cet éclat même.

Vois, par exemple.

Des formes féminines, nues ; dorées, bronzées, de colorations à la fois sombres et ardentes. Le soleil les a brulées, mais il les a pénétrées aussi. Il les habite, il rayonne d’elles, et ces formes de ténèbres recèlent la plus intense des chaleurs lumineuses. À cette clarté, l’âme, d’abord, te semble transparente de créatures promptes au rire, au plaisir, hardies, agiles, vigoureuses, amoureuses, comme autour d’elles les grandes fleurs aux enlacements audacieux, — de ces filles indolentes