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NOA NOA

les continents — arrive dans le district avec une boîte de bijoux en cuivre doré.

Il étale sa marchandise ; on l’entoure,

Une paire de boucles d’oreilles circule de mains en mains. Tous les yeux de femmes brillent, toutes la désirent.

Téhura fronce les sourcils et me regarde. Ses yeux me parlent très clairement. Je fais semblant de ne pas comprendre.

Elle m’attire dans un coin :

— Je la veux.

Je lui fais observer qu’en France cette niaiserie n’aurait aucune valeur, que c’est du cuivre.

— Je la veux !

— Mais quoi ? Payer vingt francs une pareille saleté ! Ce serait folie. Non.

— Je la veux !

Et, avec une volubilité passionnée, les yeux pleins de lames :

— Allons ! tu n’auras pas honte de voir ce bijou aux oreilles d’une autre femme ? Déjà un tel parle de vendre son cheval pour offrir la paire de boucles à sa vahiné

Je ne peux me résigner à cette sottise. Je refuse pour la seconde fois.

Téhura me regarde encore, fixement, sans plus rien dire, et pleure.