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un enchaînement de causalité quelconque : le logicien en particulier, lui qui parle de cas qui effectivement ne se sont jamais passés dans la réalité, le logicien s’est habitué au préjugé de croire que les pensées occasionnent des pensées.

Nous croyons — et nos philosophes eux-mêmes croient encore — que c’est le sens du plaisir et de la douleur de provoquer des réactions. On a présenté véritablement, pendant des milliers d’années, le plaisir et le désir de se soustraire au déplaisir comme motifs de toute espèce d’action. Avec un peu de réflexion nous pouvons concéder que tout se passerait ainsi, exactement d’après le même enchaînement de causes et d’effets, si ces états de plaisir et de douleur n’existaient pas : et l’on se trompe simplement si l’on prétend qu’ils occasionnent n’importe quoi. Ce sont des phénomènes secondaires avec une toute autre finalité que celle de provoquer des réactions ; ce sont des effets faisant déjà partie du processus de réaction qui est en cours…

En somme : tout ce qui devient conscient est un phénomène final, une conclusion qui n’occasionne rien du tout ; toute succession dans la conscience est absolument atomistique. — Et nous avons essayé de comprendre le monde en nous basant sur des conceptions contraires, — comme si rien n’était effectif, rien n’était réel sinon la pensée, le sentiment, la volonté !…