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Je dois disparaître ainsi que toi, me coucher, comme disent les hommes vers qui je veux descendre.

Bénis-moi donc, œil tranquille, qui peux voir sans envie même un bonheur trop grand !

Bénis la coupe qui veut déborder, que l’eau toute dorée en découle, apportant partout le reflet de ta joie !

Vois ! cette coupe veut se vider à nouveau et Zarathoustra veut redevenir homme. »

Ainsi commença le déclin de Zarathoustra.

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2.

Zarathoustra descendit seul des montagnes et il ne rencontra personne. Mais lorsqu’il arriva dans les bois, soudain se dressa devant lui un vieillard qui avait quitté sa sainte chaumière pour chercher des racines dans la forêt. Et ainsi parla le vieillard et il dit à Zarathoustra :

« Il ne m’est pas inconnu, ce voyageur : voilà bien des années qu’il passa par ici. Il s’appelait Zarathoustra, mais il s’est transformé.

Tu portais alors ta cendre à la montagne : veux-tu aujourd’hui porter ton feu dans les vallées ? Ne crains-tu pas le châtiment des incendiaires ?

Oui, je reconnais Zarathoustra. Son œil est pur et sa bouche ne recèle point de dégoût. Ne s’avance-t-il pas comme un danseur ?

Zarathoustra s’est transformé, Zarathoustra s’est fait enfant, Zarathoustra s’est éveillé : que vas-tu faire maintenant auprès de ceux qui dorment ?