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génieux à se faire souffrir et à mortifier ses sens. Un jour qu’il était dans le bois de Baslieu, avec un assez grand nombre de personnes de piété, où il se faisait une assemblée, chacun étant fort incommodé de guêpes et autres sortes de mouches, lesquelles étaient en si grand nombre, qu’on ne pouvait les supporter ; il n’y eut que ce Serviteur de Dieu qui ne changeât pas de place ; il se laissait tourmenter par ces animaux, comme s’il eût été mort, et cela un très long espace de temps : ce qui donna de l’admiration, voyant qu’il se servait adroitement de tout pour se mortifier et souffrir.

Quoique, depuis sa conversion, il avait pratiqué excellemment la vertu de pauvreté, néanmoins quelque temps avant sa mort, il les pratiqua encore dans un degré plus éminent ; car après s’être défait de ses meubles, il passa plus avant, et on lui vit faire une plus exacte recherche dans tous les endroits de sa maison, et il n’y eut pas jusqu’à une image de papier, ni une sentence, qu’il ne s’en voulût défaire, aussi bien que de l’argent qu’il possédait.

Pour la dépense de sa maison, il trouva le moyen de satisfaire son désir qui était de vivre en pauvre prêtre ; car il fit les Sœurs de sa Communauté (p. 63) ses intendantes, lesquelles lui apportaient à manger pour lui et pour son petit séminaire ; et lorsque lesdites Sœurs, faute de pourvoir aux heures, aux choses nécessaires, ils attendaient avec lui en patience, en sorte que lorsqu’on leur portait leurs portions, on les trouvait et principalement M. le Théologal, qui attendaient après leur examen ; il allait au-devant, et recevait avec respect et en grand silence ce qu’on apportait ; c’est ce que lesdites Sœurs ont rapporté plusieurs fois avec grande confusion d’elles-mêmes de l’avoir fait attendre.

Je dirai encore sur la haine qu’il se portait à lui-même, qu’il se servait de toutes les occasions que la divine Providence lui fournissait pour mortifier ses sens, ne se plaignant jamais de ce qui ne regardait que sa personne. Il me souvient à ce propos que, comme il était obligé de prendre quelque chose en chaire lorsqu’il prêchait, à cause qu’il avait les poumons tout desséchés, on lui donna un jour à boire de l’eau qui sentait mauvais, à raison que le vaisseau était empuanti ; il la prit et n’en fit pas un mot de plainte, quoique cela l’incommodât notablement. La personne qui lui présenta ayant ressenti cette mauvaise odeur, lui en fit ses excuses, mais il lui dit qu’il n’y avait point de mal ; on a remarqué que de semblables petits accidents lui arrivaient souvent, cet homme de Dieu en savait faire son profit ; c’était dans de pareilles occasions qu’il disait