Puisque tu connais tous les secrets, ô mon garçon, pourquoi es-tu en proie à tant de vains tourments ? J’admets que les choses ne marchent pas selon tes désirs, mais au moins sois gai en ce moment où tu respires encore[1].
Partout où je porte les yeux, je crois voir le gazon du paradis, le ruisseau du Kooucer[2]. On dirait que la plaine, sortie de l’enfer, s’est transformée en un séjour céleste[3]. Repose-toi donc dans ce séjour céleste auprès d’une céleste beauté.
Ne suis pas d’autre voie que celle que suivent les Kèlènders[4], ne recherche pas d’autre lieu que la taverne ; ne t’occupe que de vin, de chant et de l’amie (la Divinité) ; mets dans ta main une coupe de vin, sur ton dos une gourde ; bois, ô objet chéri de mon cœur ! bois et cesse de dire des sottises.
Veux-tu que ta vie repose sur une base solide ? Veux-tu vivre quelque temps, ayant le cœur affranchi de tout chagrin ? Ne demeure pas un instant sans boire du vin, et alors à chaque respiration tu trouveras un nouvel attrait à ton existence.
Dans ce monde, cette maison d’escamoteurs, il est inutile de compter sur un ami. Écoute le conseil que je te donne et ne le confie à personne : Supporte tes souffrances, n’y cherche aucun remède, sois heureux dans tes chagrins, ne cherche pas à les faire partager.
- ↑ Ce quatrain renferme encore un trait contre les moullahs, qui ont la prétention de posséder la science, et qui, selon le poëte, vivent néanmoins constamment dans les angoisses du doute, source de tout déportement.
- ↑ Voyez note 3, quatrain 4O3 , et note 1, quatrain 102.
- ↑ Allusion au printemps, comparé au paradis, qui succède à l’hiver, lequel est assimilé à l’enfer.
- ↑ Voyez note 1, quatrain 312.