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LES QUATRAINS DE KHÈYAM.


401

Pendant que je tirais l’horoscope du livre de l’amour, tout à coup, du cœur brûlant d’un sage sortirent ces mots : « Heureux celui qui « en sa demeure possède une amie belle comme la lune, et qui a en « perspective une nuit longue comme une année ! »


402

La succession constante du printemps et de l’automne fait disparaître les feuilles de notre existence. Bois du vin, ami, car les sages l’ont bien dit, les chagrins de ce monde sont un poison, et l’antidote de ce poison c’est le vin.


403

Ô mon cœur[1] ! bois du vin, bois-en dans un jardin et jouis de la présence de l’amie (la Divinité) ; renonce à l’hypocrisie, à la fourberie. Est-ce la doctrine d’Ahmed[2] que tu suis ? En ce cas, puise une coupe de vin dans le bassin qu’en qualité d’échanson Ali dessert[3].


404

Hier au soir j’ai brisé contre une pierre la coupe en faïence. J’étais ivre en commettant cet acte d’insensé. Cette coupe semblait me dire : « J’ai été semblable à toi, tu seras à ton tour semblable à moi. »


405

Les fleurs se sont épanouies ; ô échanson ! apporte du vin. Laisse là tes actes de dévotion, ô échanson ! Avant que l’ange de la mort se soit mis à l’affût contre nous, viens, et, une coupe de vin en rubis à la main, jouissons durant quelques jours de la douce présence de l’amie (la Divinité).

  1. C’est évidemment à un moullah que, par cette expression de tendresse, le poëte s’adresse.
  2. Mohammed.
  3. Plaisanterie à l’endroit du Kooucer. (Voyez le Koran, chapitre Le Kooucer.) « C’est un fleuve, disent les commentateurs sacrés, dont le lit est en pierreries précieuses. L’eau en est plus blanche que le lait, plus fraîche que la neige, etc. » (Voyez plus haut, note 1, quatrain 102.) La tradition élève Ali, gendre de Mohammed, au rang d’échanson céleste, chargé de puiser dans ce fleuve, et de servir, dans des coupes d’argent, la liqueur qu’il distribue aux bienheureux.