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LES QUATRAINS DE KHÈYAM.


235

Voici l’aurore, lève-toi, ô source des mignardises[1] ! Bois tout doucettement du vin et fais-nous entendre les sons harmonieux de la harpe, car la vie de ceux qui dorment encore ne sera pas de longue durée, et de tous ceux qui ne sont plus aucun ne reviendra.


236

Ô toi, qui connais les secrets les plus cachés au fond du cœur de chacun, toi qui relèves de ta main tous ceux qui tombent dans la détresse, donne-moi la force de la renonciation et agrée mes excuses, ô Dieu ! toi qui donnes cette force à tous, qui agrées les excuses de tous[2] !


237

J’ai vu sur les murs de la ville de Thous[3] un oiseau posé devant le crâne de Key-Kavous[4]. L’oiseau disait à ce crâne : « Hélas ! que « sont donc devenus le bruit des anneaux de ta gloire et le son du « clairon ? »


238

Ne me fais point de question sur les vicissitudes de ce monde, ni sur les choses futures. Considère comme un butin ce moment du présent, ne t’inquiète pas du passé et ne m’interroge pas sur l’avenir.

  1. Cette exhortation est à l’adresse de l’échanson, qui, en Perse, est la plupart du temps musicien et remplit ainsi deux fonctions à la fois.
  2. C’est par ironie que le poëte semble ici demander à Dieu la force de renoncer au vin et d’agréer son repentir. Il emploie cette circonlocution pour faire mieux ressortir l’inconséquence des moullahs lorsqu’ils prêchent l’immensité de la miséricorde de Dieu, sa puissance illimitée, et qu’ils ajoutent néanmoins que ceux qui n’adhèrent pas à leur doctrine sont prédestinés aux flammes de l’enfer. (Voyez le Koran, chapitre La vache, verset 37.)
  3. Cette ville était située près de Mech’hèd, dans le Khoraçan.
  4. Voyez, pour l’histoire de ce prince, note 1, quatrain 61.