Page:Nicolaï - La mort fait le trottoir, 1948.djvu/49

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
45
LA MORT FAIT LE TROTTOIR

Rentrée dans sa chambre, Ruby, quelques instants plongea dans une détresse immense. Sa solitude l’accablait. Elle n’avait pas eu le temps de nouer avec Liliane une amitié profonde ; et d’ailleurs elle sentait la jeune femme trop différente d’elle. Mais la camaraderie qui s’était établie entre les May Sisters était précieuse. Elle comptait beaucoup sur Liliane pour l’aider dans ses débuts. Un moment, elle pensa à tout abandonner et à rentrer chez ses parents. Mais la pensée du triomphe de son père et surtout de sa mère lui fut odieuse. Elle devina les sarcasmes que, sa vie durant, elle devrait endurer, la sujétion dans laquelle elle serait tenue. Et puis elle songea que, malgré l’attitude de Liliane, il ne serait pas chic de laisser celle-ci sans partenaire en plein succès. Elle raidit son courage. Il lui fallait apprendre à surmonter les épreuves. Elle en rencontrerait sans doute d’autres, et plus terribles, dans sa vie indépendante.

Un regard sur sa montre lui apprit qu’elle avait juste le temps de se rendre au Casino.

Dans le couloir, elle se heurta presque à Max qui entrait.

Ruby s’étonna.

— Comment avez-vous su… ?

Le Martiniquais, en riant, retira sa pipe de ses lèvres pour lui répondre :

— Je vous assure bien que j’ignorais que vous habitiez ici.

— Mais vous-même y demeurez ?