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LA MORT FAIT LE TROTTOIR

l’hôtel Minerva. Elle était si troublée qu’elle ne distingua pas tout de suite le trou de la serrure, puis, la clef engagée, ne parvint pas immédiatement à faire tourner le pêne.

L’homme était derrière elle. Elle le sentit s’approcher ; elle perçut sur sa nuque son souffle.

Une boule s’immobilisa dans sa gorge. La porte au même instant enfin céda. Ruby se jeta dans l’entrée, brutalement claqua la porte derrière elle. Et elle resta là, haletante, la main sur son cœur qui battait la chamade.

Dans la maison, tout était silencieux, comme mort. Une ampoule nue éclairait crûment le vestibule. L’homme devait être parti, découragé.

La jeune fille gagna sa chambre, en ferma la porte à clef.

La tige d’un des œillets rouges s’était brisée et la fleur tristement pendait au flanc du vase. Aucun des objets qui garnissaient la pièce ne lui était familier. Il n’y avait dans un coin que sa valise. Elle l’ouvrit, en tira une longue chemise bleue, commença à se dévêtir. Ce lui fut une impression étrange de se trouver dans un lit très large, un lit pour deux personnes. Elle n’avait jamais couché que dans son lit étroit de jeune fille. Après avoir jeté un dernier coup d’œil sur cette chambre qui n’était pas encore sienne, elle éteignit la lumière. Et comme elle étendait les bras sur la grande couche, elle pensa qu’un corps d’homme eût pu être