Page:Nichault - Le Faux Frère.pdf/192

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’estime, et il serait désolé qu’on lui causât la moindre peine à propos de lui, j’en suis certaine.

— Vous avez mille fois raison, mademoiselle, et personne ici ne pense à lui nuire ; mais est-ce flétrir la réputation d’une jolie femme que de supposer qu’on l’a aimée en la voyant pour la première fois, sous un climat glacé, et qu’on l’aime encore en la retrouvant plus séduisante que jamais, dans le plus beau pays du monde ?

— N’importe, interrompit madame de Lormoy, je vous prie de ne point parler de cela ; l’intérêt que la princesse porte à cette jeune fille, nous impose des égards envers elle, et le moindre mot à ce sujet pourrait lui faire un tort irréparable. Il ne saurait y avoir d’avenir heureux dans l’amour de mon fils pour elle, et le mieux est de ne pas paraître s’en apercevoir.

— Vous en parlez bien facilement, madame, mais mon ami, qui n’est pas aussi philosophe, vous dira quels sont les sentiments qu’inspire cette charmante Tartare : elle séduit d’abord, ensuite on l’adore : puis on veut l’épouser, voilà la gradation subite ; il en est là, lui.

— Et je n’aurais pas rougi de l’avouer hier, dit M. de Boisvilliers ; mais alors je croyais son cœur libre,