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LORELY.

aimait le talent. Ce sont des sujets antiques, sobrement traités, avec une grande science du dessin, froids et corrects, — en un mot de la sculpture peinte. On voit encore dans cette salle quelques figures de Canova et un buste de Gœthe lui même, qui est loin de valoir celui de David, mais qui, dit-on, est plus ressemblant.

On nous a permis encore de voir le jardin, assez grand, mais planté pour l’utilité plus que pour l’agrément, — ce qu’on appelle chez nous un jardin de curé. Un pavillon en charpente, qui s’avance devant la maison avec l’aspect d’un chalet suisse, et des charmilles de vigne vierge, donnent pourtant un certain caractère à tout l’ensemble.

Le pays de Saxe-Weimar est un duché littéraire. On y distribue aux poëtes et aux artistes des marquisats, des comtés et des baronnies… Les noms des hommes illustres qui l’ont habité y marquent des places et des stations nombreuses qui deviennent des lieux sacrés. Si jamais le flot des révolutions modernes doit emporter les vieilles monarchies, il respectera sans doute ce coin de terre heureux où le pouvoir souverain s’est abrité depuis longtemps sous la protection du génie. Charles-Auguste, qui avait fait de Goethe son premier ministre, a voulu qu’on l’ensevelît lui-même dans une tombe placée entre celles de Goethe et de Schiller. — Il prévoyait des temps d’orage, et, renonçant au monument blasonné des empereurs ses aïeux, il s’est trouvé mieux couché entre ces deux amis, dont la gloire s’ajoute à la sienne et le défend à jamais contre l’oubli.


VII — SCHILLER, WIELAND, LE PALAIS


Les spectateurs étrangers des fêtes passaient comme moi une partie de leur temps à visiter les anciennes demeures des grands hommes qui ont séjourné à Weimar, telles que celles de Lucas Cranach, qui a orné la cathédrale d’un beau tableau, de Wieland, de Herder et de Schiller. J’ai visité encore