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Le bras qui la portait fit un vaste ravage,
Elle se reposa, quand ce bras fut lassé !....
Mais l’avide vautour, qu’attire le carnage,
       Sait dans quels lieux elle a passé !

*

Maintenant qu’il n’est plus, le fils de la victoire,
Cessons, faibles mortels, d’outrager sa mémoire ;
Relevons ses lauriers trop long-temps avilis :
Puisque de ses revers il a porté la peine,
Oublions les erreurs du serf de Sainte-Hélène,
En songeant aux exploits du héros d’Austerlitz !

Il ne doit qu’à Dieu seul le compte de sa vie :
Qui sait s’il ne fut pas plein de la seule envie
D’attacher des lauriers à nos fiers étendards ;
Si ce n’est pas pour nous qu’il conquit la victoire,
Et s’il ne rêva pas, au milieu des hasards,
La gloire de la France, et non sa propre gloire ?

On dit qu’il fit le mal ; mais les cruels destins
Permettent-ils toujours le bien à la puissance ?
Qu’on a vu de ces rois, maudits par les humains,
À qui le sot jaloux défendit la clémence !
Souvent les noirs complots de quelques courtisans
Font le crime d’un prince et l’effroi de la terre :
Rois, chassez de vos cœurs ces monstres malfaisans ;
Il suffit d’un Séjan pour former un Tibère.