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LES FILLES DU FEU

bien ni mal, pendant lequel temps il me sollicitait par lettres de prendre résolution de nous en aller ensemble, à quoi je n’étais encore résolue, mais les huit jours étant passés, mon père lui dit dans le jardin : « Je m’étonne de votre effronterie, que vous restiez encore dans ma maison après ce qui s’est passé ; allez-vous-en vitement, et ne venez jamais à pas une de mes maisons, car vous ne serez jamais le bienvenu. »

» Il s’en vint donc vitement faire seller un cheval qu’il avait, et monta à sa chambre pour y prendre ses hardes ; il m’avait fait signe de monter à la chambre d’Haraucourt, où, dans l’antichambre, il y avait une porte fermée, où l’on pouvait néanmoins parler. Je m’y en allai vitement et il me dit ces paroles : « C’est cette fois qu’il faut prendre résolution, ou bien vous ne me verrez jamais. »

» Je lui demandai trois jours pour y penser ; il s’en alla donc à Paris et revint au bout de trois jours a Verneuil, pendant lequel temps je fis tout ce que je pus pour me pouvoir résoudre à laisser cette affection, mais il me fut impossible, encore que toutes les misères que j’ai souffertes se présentèrent devant mes yeux avant de partir. L’amour et le désespoir passèrent sur toutes ces considérations ; me voilà donc résolue. »

Au bout de trois jours, La Corbinière vint au château et entra par le petit jardin. Angélique de Longueval l’attendait dans le petit jardin et entra par la chambre basse, où il fut ravi de joie en apprenant la résolution de la demoiselle.


Le départ fut fixé au premier dimanche de carême, et elle lui dit, sur l’observation qu’il fit, « qu’il fallait avoir de