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LES FILLES DU FEU

aux plus jeunes filles des intonations de contralto, par moments !

— Vous voilà, mes enfants, dit l’hôtesse… Eh bien, on va mettre un fagot dans le feu !

— Nous vous demandons à souper, sans indiscrétion.

— Voulez-vous, dit l’hôtesse, qu’on vous fasse d’abord une soupe à l’oignon.

— Cela ne peut pas faire de mal, et ensuite ?

— Ensuite, il y a aussi de la chasse.

Nous vîmes là que nous étions bien tombés.

Sylvain a un talent, c’est un garçon pensif, — qui n’ayant pas eu beaucoup d’éducation, se préoccupe pourtant de parfaire ce qu’il n’a reçu qu’imparfait du peu de leçons qui lui ont été données.

Il a des idées sur tout. — Il est capable de composer une montre… ou une boussole. — Ce qui le gêne dans la montre, c’est la chaîne, qui ne peut se prolonger assez… Ce qui le gêne dans la boussole, c’est que cela fait seulement reconnaître que l’aimant polaire du globe attire forcément les aiguilles ; — mais que sur le reste, — sur la cause et sur les moyens de s’en servir, les documents sont imparfaits !

L’auberge, un peu isolée, mais solidement bâtie, où nous avons pu trouver asile, offre à l’intérieur une cour à galeries d’un système entièrement Valaque… Sylvain a embrassé la fille, qui est assez bien découplée, et nous prenons plaisir à nous chauffer les pieds en caressant deux chiens de chasse, attentifs au tourne-broche, — qui est l’espoir d’un souper prochain…