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LES FILLES DU FEU

Je puis encore vous donner un avant-goût de l’intérêt de cette histoire, dont quelques personnes semblaient douter, en reproduisant des notes que j’ai prises dans la bibliographie Michaud.

Après la biographie de Charles Bonaventure, comte de Bucquoy, généralissime et membre de l’ordre de la Toison-d’Or, célèbre par ses guerres en France, en Bohème et en Hongrie, et dont le petit-fils, Charles, fut créé prince de l’Empire, — on trouve l’article sur l’abbé de Bucquoy, — indiqué comme étant de la même famille que le précédent. Sa vie politique commença par cinq années de services militaires. Échappé comme par miracle à un grand danger, il fit vœu de quitter le monde et se retira à la Trappe. L’abbé de Rancé, sur lequel Chateaubriand a écrit son dernier livre, le renvoya comme peu croyant. Il reprit son habit galonné, qu’il troqua bientôt contre les haillons d’un mendiant.

À l’exemple des faquirs et des derviches, il parcourait le monde, pensant donner des exemples d’humilité et d’austérité. Il se faisait appeler le Mort, et tint même à Rouen, sous ce nom, une école gratuite.

Je m’arrête de peur de déflorer le sujet. Je ne veux que faire remarquer encore, pour prouver que cette histoire a du sérieux, qu’il proposa plus tard aux états unis de Hollande, en guerre avec Louis XIV, « un projet pour faire de la France une république, et y détruire, disait-il, le pouvoir arbitraire ». Il mourut à Hanovre, à quatre-vingt-dix ans, laissant son mobilier et ses livres à l’Église catholique, dont il n’était jamais sorti. — Quant à ses seize années de voyages dans l’Inde, je n’ai encore là-dessus de données que par le livre en hollandais de la Bibliothèque nationale.