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Faire des observations n’est pas toujours sans dangers. Sans le besoin de mettre la peur dehors, l’amitié, quand il le faut, reprend, redresse, corrige.

L’amitié n’est pas égoïste. Ce qu’elle possède, elle en fait une noble part et le fait noblement. Son aspiration est trop que les siens soient dans le contentement.

L’amitié regarde comme fait à elle-même le bien que d’autres leur procurent et croit jouir de celui qu’elle n’a pas, quand elle sait qu’ils en jouissent. Fait-elle que qui ne s’estime pas né heureux le puisse devenir.

Ceux qu’elle chérit, sans les louer à haute voix, dès le matin, elle leur trouve mille bonnes qualités. Qu’on pense autrement, elle souffre.

L’amitié, plus vivement que l’injure faite à elle-même, ressent celle qu’on leur fait. On les frappe, elle est frappée. Tous les traits passent par eux jusques à elle.

Touchant ce qui leur ferait défaut, elle le voudrait couvrir de l’ombre de son manteau. Elle préférerait à son honneur l’honneur de ceux qu’elle affectionne. Où rien de pareil ?

Autant que l’âcre causticité, la médisance, la calomnie, elle repousse sans pitié la raillerie de mauvais aloi. N’est pas ami qui, pour un bon mot, sacrifie son ami. C’est esprit mal fait, indigne de l’estime.