Page:NRF 5.djvu/731

Cette page n’a pas encore été corrigée

fin rasoir à la lame exténuée, épaisse comme l'ongle et large a peine d'un demi-centimètre.) Ça n’a plus que l’âme, vous direz ! Il a douze ans que les repassages l’ont amené à cet état. Mais je vous défie de trouver meilleur, je ne l’aiguise même plus… Ce rasoir-là, ce n’est plus un instrument, c’est une personne, et si sensible que je n’oserais même plus le tremper dans l’eau bouillante. La paume de la main, voilà sa meule ; et pour l’éprouver, le fil de mon ongle… je l’appelle Bistouri, té ! le cher petit !… (Confidentiel) Si vous voulez, je vous le réserverai. Car, vous savez, jamais de la vie il n’aurait voulu seulement effleurer les joues d’un paysan ou d’un de ces hommes comme il y en a, tout en cuir.

Il soulève la peau de la tempe droite de Maurice et commence son opération.

Monsieur Truc. — Et si je laissais tomber la conversation ?…

Monsieur Bœuf. — Imbécile !…

Monsieur Truc. — Oui, je pense que je ferais mieux… Mieux pour toi, pauvre fada ! Parce que, si je disais sur toi tout ce que je sais, devant ces messieurs, ils en apprendraient du propre !

Monsieur Bœuf. — Si tu crois me faire peur…

Monsieur Truc. — Seulement, tu es mon collègue et, de nous deux, le plus bête… Ce n’est pas de ta faute, mais ta mère a oublié de te mettre quelque chose dans la cervelle quand elle t’a fait… Alors, je te ménage.

Monsieur Bœuf. — Tu me ménages, grosse andouille ?… n’empêche qui si je disais ici ce que tu as osé me soutenir au café de madame Toesca-Sardou, ils rigo-